EMANUEL LICHA Quelques ruses architecturales pour l’engagement des corps La préoccupation des interlocuteurs et un goût marqué pour l’implication du spectateur amènent à considérer la position des corps vis-à-vis de l’objet : comment celui-ci est approché, qu’en est-il fait, et pourquoi. Des pièces récentes tentaient d’établir la rencontre avec le spectateur - au-delà de leur dispositif - comme matière de l’œuvre. Le trouble qui est désormais introduit vient de l’élimination de la possibilité de rencontre : il ne s’agit pas d’une rencontre qui ne se fait pas, mais plutôt d’une non-rencontre qui se fait, entre des corps incapables de se rejoindre. Les dispositifs créés travaillent donc à interner, à isoler et éloigner de l’autre. L’artiste-architecte reconnait un vide, s’y engage, travaille à le circonscrire (sans le remplir), et invite ensuite l’autre (son spectateur, son usager) à s’y engager à son tour et de tout son corps. Cette dernière étape est supplémentaire aux autres formes d’art. L’architecture a cette capacité d’appeler les corps pour les intégrer à son propos. Elle est d’ailleurs tout entière conçue pour eux, dans ses dimensions et dans ses liens à l’espace dans lequel elle travaille à les déplacer. Elle élabore des formes tout en ayant simultanément et impérativement le souci des corps qu’elles accueilleront. Elle doit les appeler, les séduire, répondre à leur Désir. Le sens de l’architecture est avant tout celui des corps, comme l’est celui de l’érotisme. |